À chaque époque, pour répandre le feu de son amour sur la terre, l’Esprit Saint suscite des personnes porteuses d’un regard neuf sur les réalités de leur temps. À certaines, il communique un charisme de fondateur, source d’une spiritualité particulière et d’une mission à transmettre à des disciples pour la continuer.
Au moment où il est le plus désemparé humainement, rue du Pot-de-Fer à Paris, Louis-Marie Grignion de Montfort, jeune prêtre, vit une expérience spirituelle intense. La méditation des écrits sapientiaux bibliques et sa proximité avec les blessés de la vie le conduisent à contempler, en Jésus de Nazareth, la Sagesse Éternelle et Incarnée.
Marqué par cette relation profonde avec le Christ, nourri et pétri de la Parole de Dieu, Montfort va vers ses frères et sœurs, particulièrement les plus pauvres. Il leur révèle ce trésor de Sagesse : la tendresse de Dieu se déploie sur l’humanité. Il proclame sans cesse ce chemin de bonheur, dans l’abandon à la Providence.
À la même époque, la jeune Marie-Louise Trichet cherche, sous la mouvance de l’Esprit, la volonté de Dieu sur elle. Sa rencontre avec Louis-Marie sera décisive pour le futur. Il l’entraîne à vivre à l’école de la Sagesse et lui dévoile la folie de la Croix.
Marie-Louise s’y engage totalement et prend un chemin dont elle ne soupçonne pas les contradictions :
– Alors qu’elle aspire au silence et à la vie cachée, elle va partager le quotidien des pauvres à l’Hôpital général de Poitiers, dans le bruit et les disputes. Folie ou sagesse?
– Au cœur de la détresse qu’elle côtoie dans ce lieu d’exclusion et de marginalisation, elle contemple la Sagesse incarnée et crucifiée. Elle y découvre son amour et sa douceur et en devient le reflet. Folie de la Croix?
Fidèle à l’écoute du Christ, sous la conduite de son guide spirituel, elle accepte une longue maturation de sa vocation. Peu à peu, elle comprend que Montfort compte sur elle pour fonder un Institut religieux et répondre, de manière inédite, aux besoins pressants de son temps.
L’Esprit tisse les liens d’une amitié profonde entre Louis-Marie et Marie-Louise. Ensemble, ils rendent possible la fondation de la Congrégation des Filles de la Sagesse, fixée par la tradition au 2 février 1703, à Poitiers.
À une lente germination de dix années succède, pour cette femme audacieuse, une période riche en évènements :
– « Quitter Poitiers pour La Rochelle » (1715), dure mais féconde expérience pour Marie-Louise et Catherine Brunet, sa première compagne;
– Presser le Père de Montfort de mettre par écrit une Règle (1715) afin de passer de l’intuition à l’institution;
– Apprendre de loin, la mort du Fondateur, le 28 avril 1716.
Marie-Louise poursuit sa voie avec détermination, créativité et fidélité. Elle établit la Congrégation à Saint-Laurent-sur-Sèvre, lieu du tombeau de Montfort, où elle érige le premier noviciat. Elle ouvre de nombreuses communautés, créant maisons de charité, écoles et hôpitaux qu’elle accompagne au début de chaque fondation.
Avant de mourir le 28 avril 1759, elle écrit un Testament spirituel adressé à toutes ses sœurs « présentes et à venir ». Elle leur demande « de ne s’écarter jamais de l’esprit primitif du saint Fondateur qui est un esprit d’humilité, de pauvreté, de détachement, de charité, d’union les unes avec les autres ».
Filles de la Sagesse d’aujourd’hui, nous sommes héritières d’un don unique de l’Esprit à l’Église. Nous suivons le chemin spirituel emprunté par Montfort et Marie-Louise, présenté particulièrement dans L’Amour de la Sagesse Éternelle. Cette œuvre invite à l’action et à un dialogue intime avec la Sagesse où la liberté personnelle est impliquée dans un processus de transformation.
Dans son Traité de la Vraie Dévotion, Montfort propose « une tendre et véritable dévotion à Marie » pour favoriser la croissance de la Sagesse en chacune de nous et faire advenir notre identité propre.
Le patrimoine spirituel reçu de nos devancières à travers la longue lignée des Filles de la Sagesse est un appel pour aujourd’hui en vue de demain. Cette invitation à la fidélité, à la créativité et au renouvellement apostolique nous stimule à partager notre spiritualité avec le Peuple de Dieu.
En explorant le passé à partir du présent, nous écrivons notre histoire personnelle et celle de la Congrégation, riches expériences d’engagement et de libération.
C’était là le plan [que Montfort] s’était formé
d’une Congrégation de Filles, qu’il voulait dédier
à la Sagesse du Verbe incarné, pour confondre
la fausse sagesse des gens du monde, en établissant
la folie de l’Évangile parmi elles.
Aussi voulut-il qu’elles portassent
le beau nom de Filles de la Sagesse.